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plutôt cet adolescent d’une figure imberbe et assez vulgaire, mais vêtu avec beaucoup de recherche, passa devant moi, je le suivis en cherchant des yeux la boutique de jouets d’enfants.

Au moment où je venais de la découvrir, j’y vis entrer l’adolescent qui était descendu de cabriolet devant moi ; je le trouvai auprès du comptoir, lorsque je m’y présentai à mon tour : deux autres personnes attendaient dans cette boutique : la première était un chasseur portant le couteau de chasse en sautoir, l’habit vert, les épaulettes d’argent et le tricorne empanaché de plumes de coq, la seconde était une fort jolie fille qui me parut une fringante soubrette à en juger du moins par sa mine éveillée, son frais petit bonnet, son tablier bien blanc et sa mise proprette. Le chasseur, grand garçon leste et dégourdi, me parut en conversation réglée avec la femme-de-chambre, assise à ses côtés ; tandis qu’une vieille au teint jaune et ridée, à l’air revêche, aux yeux gris perçants, était pour ainsi dire accroupie derrière le comptoir.

L’adolescent dont j’avais été précédé, s’approcha de cette mégère, et, à ma grande surprise, il lui adressa la parole avec une sorte de déférence affectueuse.

— Bonjour, ma chère madame Laridon, — lui dit-il, — comment vous va ?

— Si vous venez pour l’affaire, — dit la vieille d’un ton maussade, — vous pouvez vous en retourner… ça ne se peut pas.

— Comment ? — s’écria l’adolescent, qui me parut cruellement désappointé ; — hier, c’était convenu…

— Eh bien ! aujourd’hui, c’est déconvenu… voilà…