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savais pas si menaçantes pour mes faibles ressources… D’ailleurs j’étais atterré par cette question qui résumait si nettement mon cruel embarras :

— Où allons-nous ?

Où aller en effet ?

Soudain je me rappelai Bamboche.

— Quelle Providence ! — pensai-je ; — et combien Claude Gérard a eu raison de m’engager à conserver son adresse !

Ouvrant aussitôt l’enveloppe qui la contenait, j’y trouvai une carte satinée, où je lus en lettres gravées presque imperceptibles :

Le capitaine Hector Bambochio, 19, rue de Richelieu.

Quoique ce grade militaire, et que cette terminaison étrangère du nom de mon ami d’enfance me surprissent étrangement, et me laissassent beaucoup à penser, je me trouvais dans une situation trop critique… et, je le dis en toute sincérité, j’éprouvais un trop vif désir de revoir Bamboche pour m’arrêter à ces scrupules ; je me crus sauvé de la funeste position où je me trouvais, et je dis donc au cocher, avec un soupir de joie, en montant dans la voiture :

— Conduisez-moi rue de Richelieu, numéro 19, est-ce loin d’ici ?

— À deux pas, mon bourgeois.

Et le fiacre s’achemina vers la rue de Richelieu. Tout était oublié : l’effrayante incertitude de l’avenir, ainsi que les craintes que pouvait m’inspirer la mauvaise influence de Bamboche ; j’allais le revoir après huit années d’absence… lui qui m’aimait toujours tendre-