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J’avais d’ailleurs scrupuleusement accompli cette promesse faite à moi-même d’entretenir avec un pieux respect la tombe de la mère de Régina, modeste tombe où se lisait seulement gravé le nom de Sophie, nom de baptême de cette jeune femme, dernière humiliation infligée à sa mémoire, puisqu’on avait voulu que sa pierre funéraire ne portât ni le nom de sa famille ni le nom de son mari.

Claude Gérard, profondément touché de la triste fin de cette infortunée, avait approuvé mon désir de préserver ce tombeau d’une dégradation prochaine. Je l’entourai d’un treillage rustique qui, des deux côtés, venait circulairement aboutir au gros cyprès derrière lequel je m’étais blotti à la vue de Régina ; puis, tout autour de la pierre tumulaire, je plaquai du gazon bien vert, et je sablai de beau sable jaune l’étroite allée qui contournait cette petite pelouse ; j’avais enfin ménagé, pour la saison des fleurs des bois et des prés, une plate-bande en forme de corbeille à l’extrémité du gazon.

Plusieurs fois par semaine, je venais passer dans ce jardinet mélancolique une partie des récréations que m’accordait Claude Gérard.

L’hiver détruisit les dernières fleurs que j’avais plantées durant l’automne qui précéda le premier anniversaire de ces funérailles ; mais, vers le milieu de février, les perce-neige et les primevères sauvages dont nos prairies étaient couvertes, commencèrent de fleurir, et, le 27 février au matin, jour du bout-de-l’an, j’avais changé la plate-bande de la pelouse, alors très-verte, en une véritable corbeille de fleurs rustiques lilas et