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Mais hélas ! chaque chose a son heure…

Quelles qu’aient été les suites réservées par le hasard à un fait indigne en soi, je ne pouvais les prévoir à l’heure où je le commettais ; son indignité ne peut donc être atténuée en rien.

Je regagnais en hâte la demeure de Claude Gérard, regardant de temps à autre, et tout en marchant, les bijoux arrachés des mains du cul-de-jatte ; ils me paraissaient d’une énorme valeur.

— Ah !… si je rencontrais Basquine et Bamboche, quelle joie… — me dis-je, — comme nous aurions de quoi vivre long-temps ensemble avec l’argent de…

Mais ma pensée s’arrêta là… et, malgré ce retour aux dangereuses tendances du passé, je compris que, penser ainsi, c’était me rendre complice du cul-de-jatte… complice de la violation du tombeau de la mère de Régina ; je repoussai alors cette tentation avec horreur. Puis, malgré moi, je fus assailli d’une idée à la fois puérile et mauvaise.

— Non, non, — me dis-je, — je respecterai ces bijoux, mais ce portefeuille renferme des lettres… sans aucune valeur sans doute, puisque bientôt l’humidité de la tombe doit les anéantir… d’ailleurs personne maintenant ne peut soupçonner leur existence, elles ne manqueront à personne… En les gardant à l’insu de Claude Gérard, je ne fais tort à qui que ce soit… ce sera pour moi un grand bonheur de les posséder, et puis… le désir ardent de savoir ce qu’elles contiennent, sera pour moi le plus grand encouragement à apprendre à lire et à écrire.