rompu par les sifflements aigus du vent du nord à travers quelques arbres verts.
Je n’avais jamais été poltron ; d’ailleurs ma vie vagabonde m’avait depuis long-temps familiarisé avec toutes sortes d’incidents nocturnes ; la neige couvrait la terre à une telle épaisseur, que je ne m’entendais pas pour ainsi dire marcher.
J’arrivai ainsi non loin du cyprès auprès duquel j’avais le matin laissé la pelle et la houe après m’être caché derrière le tronc de cet arbre durant l’enterrement de la mère de Régina.
Soudain je m’arrêtai, frappé de stupeur et d’effroi.
Au lieu de voir à quelques pas de moi la fosse comblée ainsi que nous l’avions laissée le matin, et couverte d’une couche de neige, comme le reste du sol, cette fosse avait été ouverte… récemment sans doute, car deux tas de terre noirâtre, s’élevant de chaque côté de ce large trou, tranchaient sur la blancheur de la neige dont le terrain était couvert.
Si cette violation sacrilège n’eût pas atteint la tombe de la mère de Régina, peut-être aurais-je reculé devant la pensée de pénétrer ce sinistre mystère ; mais l’indignation, la colère, redoublèrent mon courage ; sentant néanmoins le besoin d’être prudent, je m’avançai sans bruit avec une extrême précaution, et j’atteignis l’arbre vert derrière lequel je m’étais blotti le matin ; je retrouvai là notre lourde pelle de chêne ; la pioche avait disparu.
Jusqu’alors je n’avais entendu aucun bruit, je prêtais l’oreille avec attention, lorsque tout-à-coup je sentis une forte odeur de fumée de tabac qui s’exhalait de la fosse ouverte.