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dirigés, fussent devenus des vices et des passions mauvaises.

La leçon durait depuis une demi-heure environ, lorsque la chaleur de l’étable et l’odeur du fumier, encore augmentées par cette agglomération d’enfants, devinrent si suffocantes, si délétères, que je ressentis ainsi que plusieurs écoliers, des nausées, une sorte d’étouffement, accompagnés de violents maux de tête, et la sueur ruissela de mon front.

Il fallut enfin ouvrir la porte de l’étable dont l’atmosphère n’était plus respirable. Un courant d’air vif et froid succédant brusquement à une température étouffante, je frissonnais, la sueur se glaçait sur mon front. Au bout de quelques instants l’on referma la porte, mais alors, ainsi que ces pauvres enfants, presque tous misérablement vêtus, je grelottais transi. J’appris plus tard par Claude Gérard que ces soudaines alternatives de chaud et de froid, que cet air vicié, infect, au milieu duquel vivaient ces pauvres créatures, leur causaient fréquemment des maladies graves, quelquefois mortelles ; rarement un élève pouvait suivre les leçons quinze jours de suite.

La classe terminée, c’était un samedi soir, je ne l’oublierai jamais, grâce à la circonstance suivante : Claude Gérard prit un grand sac divisé en deux compartiments, me donna un panier, et me dit :

— Allons, mon enfant, suis-moi.

Et il ajouta en souriant :

— Cette fois encore tu vas bien t’étonner de l’humiliation à laquelle je m’expose…

— Comment cela, Monsieur ?