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cette saison rétrécissait de beaucoup l’espace laissé aux élèves de Claude Gérard. Du reste, je n’ai jamais bien pu comprendre, si l’on devait dire que les élèves étaient dans l’étable, ou que les vaches étaient dans la classe, le local se trouvant à-peu-près également partagé entre l’espèce humaine et l’espèce bovine.

Ainsi, du côté droit, se trouvaient le râtelier, la mangeoire et une litière de fumier vieux de deux ou trois mois, qui exhalait une puanteur insupportable, tandis que, au long de la muraille gauche, j’aidai Claude Gérard à placer quelques tréteaux boiteux sur lesquels nous posâmes des planches ; devant ces tables portatives nous alignâmes plusieurs bancs dans une sorte de boue fangeuse, infecte ; car la pente du sol de l’étable amenait à cet endroit le suintement fétide de toutes les immondices des animaux.

Nous faisions ces préparatifs presque au milieu de l’obscurité ; car rien n’était plus sombre que ce local de vingt pieds de longueur environ, seulement éclairé d’un côté par la porte d’entrée, de l’autre par la petite croisée du réduit entouré de claies qui servait de chambre à l’instituteur. Le plafond très-bas, composé de solives à jour, drapées d’épaisses toiles d’araignées, laissait apercevoir le foin et la paille dont le grenier était rempli. Quand venait le froid, on fermait la porte ; alors les deux tiers de l’étable se trouvaient plongés dans les ténèbres ; de sorte que, sur une trentaine d’enfants, cinq ou six seulement pouvaient travailler à la lueur du jour que filtrait la petite fenêtre de Claude Gérard. L’instituteur remédiait d’ailleurs autant qu’il le pouvait à cet inconvénient, en appelant tour à tour chacun des enfants re-