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— Basquine ? — reprit Claude Gérard en me regardant avec surprise.

Je ne répondis rien, regrettant de m’être ainsi échappé. Pendant quelques instants, l’instituteur garda de nouveau le silence. Enfin il ajouta, sans paraître avoir remarqué ma soudaine réticence :

— Pourquoi tiens-tu tant à rejoindre tes compagnons ?

— Parce que nous nous sommes juré de ne jamais nous quitter, — m’écriai-je.

— Ordinairement, un enfant de ton âge ne s’engage guères par de pareils serments avec de grandes personnes, — me dit Claude Gérard.

— Mes compagnons ne sont pas de grandes personnes, — m’écriai-je.

Voyant que je regrettais ce second aveu involontaire, Claude Gérard ajouta :

— Allons, ne sois pas fâché d’avoir dit la vérité… cela sera peut-être bon pour toi… et pour tes compagnons… oui… pour tes compagnons…

Je regardais l’instituteur avec autant de surprise que de défiance ; il me devina, car il poursuivit avec un accent rempli de franchise et de bonté :

— Tu te défies de moi ; est-ce que j’ai l’air d’un méchant homme ? est-ce que je t’ai maltraité dans le premier moment où j’ai découvert le vol ? est-ce que je te parle avec dureté ? est-ce que je ne te montre pas plus de pitié que de colère, malgré ta mauvaise action ? Et sais-tu pourquoi cela, mon pauvre enfant ? Parce que je crois qu’il y a du bon en toi, parce que je suis sûr