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cacher que mes complices étaient de mon âge, de ne donner aucun détail sur Basquine et sur Bamboche, de laisser Claude Gérard dans son erreur.

Mon silence se prolongeant, l’instituteur reprit :

— Quels sont tes parents ? Comment ont-ils pu te laisser si jeune livré à toi-même ?…

— Je n’ai pas de parents.

— Tu n’as pas de parents ?…

— Non… je suis un enfant trouvé…

— Ah !… je comprends, — s’écria Claude Gérard, avec un soupir de commisération, — c’est cela, l’abandon d’abord… puis l’exemple du vice… puis le vice… Pauvre malheureuse créature… je n’ai plus la force de t’accuser !

La figure mélancolique de l’instituteur exprimait alors une pitié si tendre que je me sentis ému.

Après quelques moments de réflexion, Claude Gérard ajouta :

— À ton âge… le retour au bien est presque toujours possible… voyons… sois franc… avoue-moi tout… et peut-être…

— Je n’ai rien à avouer… — repris-je brutalement, — je ne veux dénoncer personne, faites-moi mettre en prison, si vous voulez…

Au lieu de s’irriter de ma réponse, Claude Gérard reprit doucement en haussant les épaules :

— En prison ?… lorsque je t’ai surpris, lorsque j’ai vu qu’on m’avait volé… est-ce que je ne t’aurais pas fait arrêter… est-ce que je n’aurais pas dénoncé le vol… si je n’avais reculé devant cette pensée : — t’envoyer en prison ? Si tu étais homme, je n’hésiterais