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— Certainement… Mais, vous, un droit que vous ne prendrez pas, — reprit dame Honorine, — c’est celui de me faire attendre comme aujourd’hui… Ah ça ! que demain la sacristie soit balayée… le colombier nettoyé…[1]

  1. Quoique l’odieux et le ridicule rivalisent dans ce tableau de la misérable condition faite à l’instituteur de la commune, le seul dispensateur de l’éducation populaire, il faut bien se garder de voir dans ces faits la moindre exagération, et surtout une exception. Nous lisons dans un excellent livre officiel, conséquemment fort modéré, mais écrit sous l’empire des plus généreuses pensées :

    « Nous disons donc que l’instituteur est souvent regardé dans la commune sur le même pied qu’un mendiant (212), qu’entre le pâtre et lui, la préférence est pour le pâtre (213) ; que les maires, quand ils veulent donner à l’instituteur une marque d’amitié, le font manger à la cuisine (214). — Et plus loin : — Toujours poursuivis par cette nécessité de se récupérer de la somme exorbitante de 200 francs qu’il fallait donner à l’instituteur, bien des conseils municipaux ont voulu comprendre au moins dans cette allocation une foule de fonctions différentes, qui seules suffiraient à absorber son temps. — Il faut qu’il soit fossoyeur et tambour, qu’il nettoie le lavoir public, qu’il monte l’horloge, qu’il cumule les fonctions de chantre et de sacristain, qu’il paie les hosties, blanchisse le linge de l’autel, et qu’il paie les balais (234). »

    Les notes suivantes, auxquelles renvoie l’auteur du livre que nous citons, sont extraites des rapports des quatre cent quatre-vingt-dix inspecteurs chargés d’inspecter les écoles de France.

    « (212) Pour les instituteurs, vous les trouvez pauvres, mal vêtus, faisant la classe en sabots, sans bas, sans gilet ni cravate. Malgré les tristes idées que je me formais de l’instruction dans ces contrées, j’étais loin de penser que les instituteurs fussent dans un état aussi déplorable. Retirant de chaque élève, avec beaucoup de peine, 30, 40, et quelquefois même 25 cent. par mois, mariés, chargés d’enfants, que peuvent-ils devenir ? (214). Mais ne recueillant de sa profession d’instituteur qu’une centaine de francs par an tout au plus, B… sert de domestique chez un fermier (234). — Dans