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— Mais où logiez-vous donc alors avant de venir ici ? — demanda le garde-champêtre de plus en plus soupçonneux.

À cette embarrassante question, Bamboche répondit hardiment :

— Nous venons de très-loin… Monsieur, d’au moins cent lieues d’ici… et nous demandions l’aumône sur la route.

— Ah ! ah ! — s’écria le garde-champêtre, — de mieux en mieux, vous êtes à ce qu’il paraît de petits mendiants vagabonds, de petits voleurs ; vous n’avez pas de parents qui puissent vous réclamer, alors, votre compte est bon… je ne vous dis que ça.

— Qu’est-ce donc qu’on nous fera, mon bon Monsieur ? dit ingénument Bamboche tout en se reculant prudemment, deux ou trois pas.

Puis il me dit à voix basse :

— Va chercher deux bonnes poignées de cendre dans le foyer… reviens derrière moi, et attention.

Puis il me dit tout haut, sans doute pour ne pas exciter la défiance du garde-champêtre :

— N’est-ce pas ? nous allons tout dire à ce bon Monsieur… va chercher nos papiers…

— J’y vas — répondis-je d’un air fin en me dirigeant vers la masure pour obéir aux ordres de Bamboche.

— Est-ce qu’on a des papiers à votre âge ? — dit le garde-champêtre en haussant les épaules, — il n’y a pas de papiers qui tiennent… Je vas vous remettre aux gendarmes qui vous mèneront ce soir en prison au dépôt de mendicité… d’où vous sortirez pour être enfermés dans une bonne maison de correction jusqu’à dix-huit