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Mais celui-ci, la repoussant durement, s’écria :

— Laisse-moi tranquille, je n’ai pas envie de rire, moi…

Les traits de Basquine s’attristèrent soudain ; elle regarda Bamboche d’un air craintif et triste, et lui dit doucement :

— Ne te fâche pas…

— Nous être crus si riches ! — reprit celui-ci avec amertume et colère.

— Écoute, Bamboche, — lui dis-je, — si c’est pour toi que tu regrettes nos trésors… à la bonne heure ; fais du mauvais sang tant que tu voudras ;… mais si c’est pour moi, ne t’en fais pas… c’est déjà bien assez de bonheur d’être libres… et tous trois ensemble.

— Martin a raison, vois-tu ? Bamboche, — dit timidement Basquine ; — nous sommes ensemble, tant pis pour l’argent… ça n’est pas moi qui le regrette, toujours… Et puis, — ajouta-t-elle avec une sorte d’hésitation craintive, — au moins… comme cela… nous n’aurons pas volé… et ça vaut mieux… n’est-ce pas, Bamboche, de n’avoir pas volé ?

— C’est vrai, — ajoutai-je. — Quant aux louis d’or qui sont avec le plomb, nous les avons joliment gagnés ;… car la Levrasse ne nous a jamais donné un sou depuis que nous travaillons pour lui… et pourtant il a ramassé de fameuses recettes.

— Qu’est-ce que ça me fait à moi de voler ? — reprit rudement Bamboche, — et comme disait le cul-de-jatte, puisqu’on ne me donne rien, je prends où je peux… C’est comme les loups… on ne leur donne rien, ils