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hâte dans un tout petit espace qu’ils se limitaient ; cet étrange exercice durait des heures entières sans interruption.

Ceux-là, assis par terre, se balançaient incessamment en jetant alternativement le haut de leur corps en avant et en arrière, n’interrompant ce mouvement d’une monotonie vertigineuse que pour rire aux éclats, de ce rire strident, guttural de l’idiotisme.

D’autres enfin, dans un complet anéantissement, n’ouvraient les yeux qu’aux heures du repas, et restaient inertes, inanimés, sourds, muets, aveugles, sans qu’un cri, sans qu’un geste annonçât leur vitalité…

L’absence complète de communication verbale ou intelligente est un des caractères les plus sinistres d’une réunion d’idiots ; au moins, malgré l’incohérence de leurs paroles et de leur pensée, les fous se parlent, se reconnaissent, se recherchent ; mais entre les idiots il règne une indifférence stupide, un isolement farouche… Jamais on ne les entend prononcer une parole articulée ; ce sont de temps à autre quelques rires sauvages ou des gémissements et des cris qui n’ont rien d’hu-