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que moi, ma dégradation va s’amoindrir à mes yeux ! Au lieu de pouvoir dire comme autrefois : Je suis aussi honnête que le plus honnête homme, je me consolerai en disant : Je suis le moins dégradé des misérables parmi lesquels je suis destiné à vivre toujours !

— Toujours ? Mais une fois sorti d’ici ?…

— Eh ! j’aurai beau être acquitté, ces gens-là me connaissent ; à leur sortie de prison, s’ils me rencontrent, ils me parleront comme à leur ancien compagnon de geôle. Si l’on ignore la juste accusation qui m’a conduit aux assises, ces misérables me menaceront de la divulguer. Vous le voyez donc bien, des liens maudits et maintenant indissolubles m’attachent à eux… tandis que, enfermé seul dans la cellule jusqu’au jour de mon jugement, inconnu d’eux comme ils eussent été inconnus de moi, je n’aurais pas été assailli de ces craintes qui peuvent paralyser les meilleures résolutions… Et puis, seul à seul avec la pensée de ma faute, elle eût grandi au lieu de diminuer à mes yeux ; plus elle m’aurait paru grave, plus l’expiation que je me serais imposée dans l’avenir eût été grave… Aussi,