Page:Sue - Les mystères de Paris, 8è série, 1843.djvu/6

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sont heureux !… Mais enfin en es-tu tout à fait débarrassée de ton gueux de mari ?

— Je l’espère, car il ne m’a quittée qu’après avoir vendu jusqu’à mon bois de lit et au berceau de mes deux petits enfants… Mais quand je pense qu’il voulait bien pis encore…

— Quoi donc ?

— Quand je dis lui, c’était plutôt cette vilaine femme qui le poussait ; c’est pour ça que je t’en parle. Enfin un jour il m’a dit : « Quand dans un ménage il y a une jolie fille de quinze ans comme la nôtre, on est des bêtes de ne pas profiter de sa beauté. »

— Ah bon ! je comprends… après avoir vendu les nippes, il veut vendre les corps !…

— Quand il a dit cela, vois-tu, Fortuné, mon sang n’a fait qu’un tour, et il faut être juste, je l’ai fait rougir de honte par mes reproches ; et comme sa mauvaise femme voulait se mêler de notre querelle en soutenant que mon mari pouvait faire de sa fille ce qu’il voulait, je l’ai traitée si mal, cette malheureuse, que mon mari m’a battue, et c’est depuis cette scène-là que je ne les ai plus revus.

— Tiens, vois-tu, Jeanne, il y a des gens