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irréfléchie, quoique bonne et compatissante.

Car, loin d’être égoïste, Rigolette n’avait de chagrins que ceux des autres ; elle y sympathisait de toutes ses forces, se dévouait corps et âme à ce qui souffrait ; mais n’y songeait plus, le dos tourné, comme on dit vulgairement.

Souvent elle s’interrompait de rire aux éclats pour pleurer sincèrement, et elle s’interrompait de pleurer pour rire encore.

En véritable enfant de Paris, Rigolette préférait l’étourdissement au calme, le mouvement au repos, l’âpre et retentissante harmonie de l’orchestre des bals de la Chartreuse ou du Colysée au doux murmure du vent, des eaux et du feuillage…

Le tumulte assourdissant des carrefours de Paris à la solitude des champs…

L’éblouissement des feux d’artifice, le flamboiement du bouquet, le fracas des bombes, à la sérénité d’une belle nuit pleine d’étoiles, d’ombre et de silence.

Hélas ! oui, la bonne fille préférait franchement la boue noire des rues de la capitale au verdoiement des prés fleuris, ses pavés fangeux