» Comment ! les classes pauvres peuplent déjà les ateliers, les champs, l’armée ; de ce monde, elles ne connaissent que misère et privations : et, lorsqu’à bout de fatigues et de souffrances, elles tombent exténuées… demi-mortes, la maladie même ne les préserverait pas d’une dernière et sacrilège exploitation ? »
N’est-il pas amer et douloureux, en effet, de penser que la maladie ne sauvegarde pas suffisamment le pauvre, que l’hospice ne lui offre pas un asile assuré, et que là encore il est exploité ? C’est une monstruosité, songer que les remèdes donnés à ce malheureux peuvent aussi bien le tuer que le sauver ; songer que le pauvre, en croyant entrer dans l’hôtel de Dieu, entre dans un amphithéâtre où, au lieu de chercher à le guérir, le médecin travaillera sur lui vivant, comme après l’anatomiste sur lui mort.
« Un tel état de choses ferait regretter la barbarie de ce temps où les condamnés à mort étaient exposés à subir des opérations chirurgicales récemment découvertes… mais que l’on n’osait encore pratiquer sur le vivant… L’opération réussissait-elle, le condamné était gracié. »
Dans ce cas, au moins, l’expérience, si elle était barbare, n’était point criminelle ; des hommes condamnés à mourir pouvaient ainsi racheter leur vie. C’était un coup de dé. Mais ces hommes n’étaient point, comme les pauvres qui peuplent les hospices, d’innocentes créatures que le médecin doit protéger, car c’est là sa mission devant la société qui l’investit de ses importantes fonctions, qu’il doit sauver, car c’est là sa mission devant Dieu qui lui donne la science.
« Les hôpitaux militaires sont, chaque jour, visi-