voyait en leur disant : Allez, et soyez guéris. La lèpre morale est tout aussi effrayante que la lèpre physique, et l’homme imploré par le libéré le chassera, ne pouvant croire à son repentir, et voyant à travers un nuage sanglant les jours qu’il passerait dans son champ ou dans son atelier.
« La condition d’un libéré est donc beaucoup plus fâcheuse, plus pénible, plus difficile qu’elle ne l’était avant sa première faute ; il marche entouré d’entraves, d’écueils ; il lui faut braver la répulsion, les dédains, souvent même la plus profonde misère. Et s’il succombe à toutes ces chances effrayantes de criminalité, et s’il commet un second crime, vous vous montrez mille fois plus sévère envers lui que pour sa première faute. »
Il est récidiviste, dit-on ! Il avait été puni et cependant le châtiment n’a pas été salutaire, donc il était trop léger, trop indulgent, il faut l’augmenter. Oui ! parce que cet homme a cherché vainement du travail, qu’il s’est traîné aux genoux de la société, en criant : Pourquoi me proscrire ? Je ne vous dois plus rien ! Je vous ai payé avec ma liberté, avec mes joies, avec mon honneur dont vous m’avez pris la plus grande part. Par pitié, faites que je mange ; ces bras que je tends vers vous, utilisez-les !… et que la société s’est détournée de lui en laissant ce malheureux seul avec sa misère, il doit être sévèrement puni. Il a pleuré toutes ses larmes, cet homme ; il a promené son oisiveté famélique partout et puis, un jour, il s’est trouvé au coin d’une rue, les yeux secs, l’estomac vide ; et il s’est demandé ce qu’il avait à faire, à cette heure où toute ressource lui échappait, où la preuve lui était bien acquise que, si Dieu pardonne, la société ne pardonne pas, et alors, soit haine pour cette dernière, en-