avons parlé plus haut. Que l’aumônier, le médecin et le directeur visitent tous les jours chacun des prisonniers et l’exhortent au repentir ; ces enseignements ne seront point perdus comme ils le sont aujourd’hui : quand l’un des visiteurs aura terminé sa pieuse et sainte mission, les compagnons du coupable ne viendront pas, sous un redoublement de récits monstrueux et cyniques, étouffer dans son esprit les semences de bien à mesure qu’on les y aura déposées ; c’est ce qui se passe maintenant. D’abord, nous le croyons ainsi, le prisonnier accueillera par de grossières injures et une tenace indifférence les bons enseignements qu’on lui donnera ; mais peu à peu dompté par l’isolement, il s’habituera à cette voix qui rompra seule le silence de sa cellule, puis il attendra avec impatience l’heure où elle sera habituée de se faire entendre, et enfin, il comprendra cette voix, ses oreilles s’ouvriront comme celles du sourd-muet sous le divin ephphetha, et l’amour du bien attisé par la consolation se rallumera dans son âme.
Ces lignes ne sont qu’une imparfaite traduction des nobles et généreuses pensées de M. Sue, qui conclut ainsi :
« Après des siècles d’épreuves barbares, d’hésitations pernicieuses, on paraît comprendre qu’il est peu raisonnable de plonger dans une atmosphère abominablement viciée des gens qu’un air pur et salubre pourrait seul sauver. Que de siècles pour reconnaître qu’en agglomérant les êtres gangrenés on redouble l’intensité de leur corruption, qui devient ainsi incurable ! Que de siècles pour reconnaître qu’il n’est en un mot qu’un remède à cette lèpre envahissante qui menace le corps social… l’isolement. »