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plus que personne qu’il y ait encore de ces braves gens qui croient avoir reçu la vie pour la gaspiller à leur fantaisie, qui ne voient dans la richesse qu’un moyen de bien manger, de bien boire et de bien dormir, qui entretiennent à grands frais des meutes de valets et des troupes de chiens et qui repoussent, en l’appelant fainéant, le pauvre s’il leur demande un morceau de pain. Et pourtant, il en est encore, et ils adorent toujours leur moi, ce moi insupportable que Pascal a honni, et ils vous disent en humant paresseusement leur cigare : Peuth ! tout cela est fort triste, mais à qui la faute ? à Dieu qui a permis le mal. Pauvres égoïstes ! rappelez-vous cette admirable parole de la théodicée de Leibnitz : Malum causam habet, non efficientem, sed deficientem.


HUITIÈME ARTICLE.


M. Sue, que distinguent une rectitude et une profondeur d’esprit égales au moins à la noblesse et à la bonté de son cœur, termine la cinquième partie des Mystères de Paris par de belles et sages réflexions, que nous rapportons ici :

« À qui fait le mal… captivité, infamie, supplice… Cela est juste ! Mais à qui fait le bien, la société décerne-t-elle des distinctions honorables, glorieuses ? Non ! Par de bienfaisantes rémunérations, la société encourage-t-elle à la résignation, à l’ordre, à la probité cette masse immense d’artisans voués à tout jamais au travail, aux privations et presque toujours à une misère profonde ? Non ! En regard de l’échafaud où monte le grand coupable, est-il un pavois où monte le grand homme de bien ? Non ! »