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mêle sur la même paillasse, comme des bêtes dans la même litière, ont continuellement sous les yeux d’abominables exemples d’ivresse, de violences, de débauches et de meurtres… oui, et trop fréquemment encore… l’inceste !!! vient ajouter une horreur de plus à ces horreurs. »

La fille du riche est bien heureuse ! nul regard ne va souiller sa chambre virginale ; rien ne trouble ses rêves doux, innocents, et l’ange de la pudeur, perdu dans les rideaux blancs de sa couche, veille sur son sommeil. Mais à la fille du pauvre la chambre commune, comme au dernier jour, la fosse commune. Les loyers sont si chers et l’on gagne si peu, puis l’hiver il fait froid, le bois vaut son pesant d’argent, et en couchant tous pêle-mêle on se réchauffe un peu.

« Les artisans les plus honnêtes, occupant presque toujours une seule chambre avec leur famille, sont forcés, faute de lit et d’espace, de faire coucher leurs enfants ensemble, frères et sœurs, à quelques pas d’eux… maris et femmes. Si l’on frémit déjà des fatales conséquences de telles nécessités, presque toujours inévitablement imposées aux artisans pauvres, mais probes, que sera-ce donc lorsqu’il s’agira d’artisans dépravés par l’ignorance ou par l’inconduite. »

Tel est le sort des enfants de l’indigent, « pauvres créatures corrompues en naissant, qui, dans les prisons où les conduisent souvent le vagabondage et le délaissement, sont déjà flétries par cette grossière et terrible métaphore : graines de bagne !!! et la métaphore a raison. Cette sinistre prédiction s’accomplit presque toujours : galères ou lupanar, chaque sexe a son avenir. »

Doit-on plus les blâmer que les plaindre, celles-là