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dera bien de délier la victime d’une pareille union. Ces liens sont sacrés, indissolubles ; c’est offenser les hommes et Dieu que de les briser.

» En vérité, l’homme est quelquefois d’une humilité bien honteuse et d’un égoïsme, d’un orgueil bien exécrables. Il se ravale au-dessous de la bête en la couvrant de garanties qu’il se refuse, et il impose, consacre, perpétue ses plus redoutables infirmités en les mettant sous la sauvegarde de l’immutabilité des lois divines et humaines. »

Ce sont là de bonnes et logiques réflexions ; la société a dans son code des articles infâmes et criminels. De là, mille souffrances dans le bouge et dans le salon ; de là, mille forfaits au bas et au faîte de l’échelle. L’homme qui, connaissant son épouvantable maladie, a pu, pour satisfaire un désir brutal, ou par un froid calcul d’ambition et d’égoïsme, tromper une jeune fille confiante et naïve, l’arracher aux jardins fleuris de son ignorante virginité pour l’associer à son existence de damné et la rendre complice du plus infâme et du plus monstrueux des infanticides, cet homme n’est-il pas plus criminel que le misérable scélérat qui assassine son semblable pour lui voler quelques écus.

Nos lignes sur les Mystères de Paris, et nous nous en félicitons, moins pour nous que pour l’ouvrage, ont soulevé d’acerbes critiques, donné lieu à de vives discussions. Entre autres choses, un de nos intimes nous ayant certifié qu’en 1843 on ne mourait plus de faim, nous nous étions laissé prendre à son air d’assurance et accusions déjà M. Sue d’avoir égaré notre religion, quand un fait local nous a ramené à notre première opinion. Mardi dernier, 24 janvier 1842, sur les marches de la place Saint-Paul, un pauvre voyageur se mourait, littéralement, de froid et de faim. Il