mais aux privations, mais paisibles, laborieux, résignés, voient chaque jour sans haine et sans envie amère… resplendir à leurs yeux la magnificence des riches ?… »
Oui, il y a quelque chose de grand, de sublime dans la résignation du pauvre ; chaque jour, les splendeurs du riche rayonnent devant ses yeux et lui montrent sa misère plus hideuse ; au coin de la rue où il attend, souvent en vain, une aumône, il voit passer à ses côtés les magnifiques voitures des heureux d’ici-bas ; quand à la porte d’un hôtel il regarde passer ceux que la fête a conviés, des robes de velours, des guirlandes de fleurs, des flots de dentelles frôlent ses pieds nus, et cependant il courbe humblement le front sans murmurer et remercie des yeux et de la voix, avec des larmes et des actions de grâces, l’opulent qui daigne le prendre en pitié. Pauvre orphelin ! déshérité du bonheur terrestre, la vie est pour lui sans soleil, sans parfum, sans limpide source, sans fruits mûrs, il se contente d’attendre et d’espérer.
Nous rencontrons dans cette partie de l’ouvrage de M. Sue une réponse adorable de naïveté.
La femme de Morel dit à ce dernier : « À quoi nous servent nos enfants ? — À me donner du courage ; sans eux, je ne me tuerais pas à travailler. — C’est comme moi ! sans les enfants, il y a long-temps que je t’aurais dit : Morel, tu en as assez, moi aussi ; le temps d’allumer un réchaud de charbon, on se moque de la misère… Mais ces enfants… ces enfants !… — Tu vois donc bien qu’ils sont bons à quelque chose, dit Morel avec une admirable naïveté. »
Ce que l’on éprouve en lisant ces lignes ne se peut