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À chaque mot l’étonnement de Rodolphe redoublait ; il ne pouvait comprendre cet épouvantable esclavage, cette horrible vente du corps et de l’âme pour un abri sordide, quelques haillons et une nourriture immonde[1].

Rodolphe et la Goualeuse arrivèrent au quai aux Fleurs : un fiacre les attendait, Rodolphe y fit monter la Goualeuse ; il monta après elle et dit au cocher :

— À Saint-Denis ; je te dirai plus tard le chemin qu’il faudra prendre.

La voiture partit ; le soleil était radieux, le ciel sans nuages, le froid un peu piquant ; l’air circulait vif et frais à travers l’ouverture des glaces baissées.

— Tiens ! un manteau de femme ! — dit la

  1. S’il nous était permis d’entrer dans des détails devant lesquels nous reculons, nous prouverions que ce servage existe, que les lois de la police sont ainsi faites, qu’une malheureuse créature, souvent vendue par ses proches et jetée dans cet abîme d’infamie, est pour ainsi dire à jamais condamnée à y vivre ; que son repentir, que ses remords sont vains, et qu’il lui est presque matériellement impossible de sortir de cette fange. — (Voir le précieux ouvrage du docteur Parent-Duchâtelet, œuvre d’un philosophe et d’un grand homme de bien.)