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signation mélancolique. — Voilà le seul souvenir qu’elle conservera de moi !

Claude Gérard, attendri, contempla un instant Martin en silence ; puis lui donnant le bouquet que Régina avait laissé tomber, il ajouta :

— Tiens, mon pauvre enfant… prends ces fleurs ; elle les avait tout à l’heure à la main.

Martin saisit ardemment le bouquet, le porta à ses lèvres par un mouvement passionné et ses larmes tombèrent sur les corolles parfumées.

 

Le soir de ce jour, M. Duriveau, qui avait éprouvé une sorte de défaillance après sa rencontre si émouvante, si imprévue, avec Just et Régina, était retiré dans sa chambre modestement meublée, comme celle des autres membres de l’association.

Mme Perrine et Claude Gérard étaient assis aux côtés du comte, tandis que Martin, accoudé sur le dossier de son fauteuil, attachait ses regards affectueux sur son père, à qui Bruyère présentait un breuvage réconfortant avec une prévenance filiale.

Soudain la porte s’ouvrit, et l’on remit à Martin une large enveloppe qu’un courrier venait d’apporter à l’instant.

C’était une lettre du roi.

— Vous permettez, mon père ? — dit respectueusement Martin à M. Duriveau, qui répondit par un signe de tête rempli d’affection.

Martin lut cette lettre, qui se terminait ainsi :

 

« Mes vœux suivront partout madame Just Clément… car je n’oublierai jamais que sa mère a fait preuve du plus admirable dévouement en sacrifiant sa réputation pour sauver la vie d’une femme que j’aimais passionnément, qu’elle chérissait comme une sœur… et qu’une indigne trahison avait mise en danger de mort, lorsque, prince royal, j’étais venu à Paris en 1814.

« Je n’ai pas besoin de vous répéter que j’ai gardé et que je garderai le plus religieux silence sur vos confidences…

 
 

« Les projets dont je vous avais entretenus dans mon avant-dernière lettre, en vous renvoyant le manuscrit de vos Mémoires, sont, à cette heure, réalisés ; je suis heureux de vous en instruire, les