— Alors, si c’est vrai, pourquoi êtes-vous aussi fainéant ? Et le colombier ? Voilà plus de huit jours que vous n’y avez mis les pieds, il est dégoûtant ; M. le curé y est monté tantôt, il a eu le cœur soulevé… il est furieux contre vous !
— Madame… permettez…
— On ne vous paye pas pour nettoyer le colombier, allez-vous dire : si ça ne fait pas pitié !… comme si vous ne pouviez pas rendre ces petits services à M. le curé !
— Je rends autant de services que je le peux à M. le curé, vous le savez bien, Madame Honorine, — répondit l’instituteur avec un calme et une douceur inaltérables. — Dès que j’aurai un moment de libre, Madame Honorine, je nettoierai le colombier.
— Il faut le trouver, ce moment-là…
— Je le trouverai, Madame Honorine.
— Pardi, je l’espère bien… Mais, autre chose : il y a une fosse à creuser pour demain matin ; voilà ce que M. le curé m’envoyait vous dire. Mais Monsieur le maître d’école est à courir la prétentaine…
— Une fosse… — dit vivement Claude Gérard, — pour cette jeune dame sans doute ? C’est donc fini ?
— Oui, c’est fini, — répondit sèchement Madame Honorine, M. le curé l’a administrée en sortant de table, — un joli pousse-café qu’il a eu là… merci…
— Pauvre jeune femme… — dit Claude Gérard avec un accent de douloureuse pitié, — mourir à cet âge… et si belle…
— Je ne plains pas les belles femmes, moi, qui toutes baronnes, toutes grandes dames qu’elles sont, se sauvent de chez leur mari avec leur amoureux, — reprit aigrement Madame Honorine.
— Cette jeune dame, depuis deux ans qu’elle habitait le village… vivait absolument seule avec sa domestique ; qu’a-t-on à lui reprocher ? — reprit Claude Gérard d’une voix sévère.
— Tiens, elle vivait seule parce qu’avant qu’elle ne vint ici, son amoureux l’avait plantée là pour reverdir et ç’a été joliment bien fait.
— Quelle horrible douleur pour la pauvre petite fille de cette