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Les prêtres sortent lentement ; Jeanne Darc, demeurée seule, s’agenouille sur la paille de sa couche, où elle est enchaînée par le milieu du corps. Elle lève vers la sombre voûte de la prison son beau visage radieux, inspiré, joint les mains et prie avec ferveur, remerciant ses saintes de lui donner le courage d’expier, de racheter son apostasie, en marchant résolument au supplice.


Les prêtres, après avoir interrogé Jeanne Darc dans son cachot, se sont rendus chez l’évêque Cauchon, afin de l’instruire du résultat de leur visite et de leur interrogatoire, résultat tellement attendu et prévu par le prélat, qu’il avait déjà convoqué dans la chapelle de l’archevêché de Rouen un nombre suffisant de juges pour procéder à la condamnation définitive de la relapse. Réunis depuis peu de temps, ils ont pris place dans les stalles de l’antique chapelle ; l’évêque Cauchon, assis au centre du chœur, les préside, il réclame d’un geste le silence et dit :

— Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ! Mes très-chers frères, Jeanne est retombée dans ses erreurs damnables, et, au mépris de son abjuration solennelle, prononcée à la face de Dieu et sur les saints Évangiles, non-seulement elle a repris ses habits d’homme, abominable endurcissement dans le péché qui suffirait à la condamner ; mais elle revient à soutenir avec une diabolique opiniâtreté que tout ce qu’elle a dit et fait, elle l’a dit et fait de par l’inspiration divine ! Je n’ai rien de plus à ajouter ; je vous requiers de vous prononcer, par ordre, sur le sort de ladite Jeanne, accusée de se montrer si épouvantablement relapse, me réservant de vous requérir de délibérer de nouveau si je le trouvais opportun.


l’archidiacre nicolas de venderesse. — Ladite Jeanne doit être abandonnée au bras séculier pour être par lui brûlée vive, comme relapse.

l’abbé aigidie. — Jeanne est hérétique et relapse, l’on n’en sau-