l’évêque cauchon. — Vous engagez-vous à ne pas tâcher de vous échapper du château de Rouen, sous peine de passer pour hérétique, puisque votre tentative d’évasion prouverait que vous voulez fuir notre tribunal ?
jeanne darc garde pendant un moment le silence, réfléchit, et son assurance revenant peu à peu, elle répond d’une voix ferme. — Je ne prends pas cet engagement ; je ne veux promettre de ne pas essayer de m’échapper.
le dominicain raoul sauvage, d’un ton menaçant. — Alors, on doublera vos chaînes pour vous empêcher d’essayer de fuir !
jeanne darc. — Il est permis à tout prisonnier de tâcher de s’échapper de sa prison.
l’évêque cauchon, sévèrement, après s’être consulté à voix basse avec quelques-uns des juges placés près de lui. — Ouïes et entendues les paroles de rébellion de ladite Jeanne, nous commettons particulièrement à sa garde le noble homme Jean le Gris, garde de notre sire le roi d’Angleterre et de France, et adjoignons à Jean le Gris les écuyers Berwick et Talbot, gens d’armes anglais, tous trois chargés de la garde de la prisonnière, et de ne permettre à personne de s’approcher d’elle ni de lui parler sans notre permission. (S’adressant au tribunal.) Ceux de nos très-chers frères qui ont quelques questions à adresser à l’accusée peuvent les lui poser.
un juge. — Jeanne, vous jurez de dire toute la vérité ?
jeanne darc, avec dignité. — J’ai déjà juré… cela suffit ; je ne mens jamais !
le juge. — Avez-vous, dans votre enfance, appris à travailler ?
jeanne darc. — Ma mère m’a appris à coudre et à filer.
un autre juge. — Aviez-vous un confesseur ?
jeanne darc. — Oui, le curé de notre paroisse.
le juge. — Avez-vous confessé à votre curé ou à un autre homme d’Église vos révélations ?
jeanne darc. — Non.