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— Jeanne, Jeanne, le sire de Villars et Jamet du Tilloy, échevins, sont en bas dans la salle ; ils désirent vous parler à l’instant. Votre page vient d’amener votre cheval ; il paraît qu’il se passe quelque chose de nouveau.

— Adieu ! à revoir, chère Madeleine ! — dit la guerrière à la jeune fille éplorée. — Rassurez-vous ; mes saintes et le Seigneur me sauvegarderont, sinon des blessures, du moins de la mort, jusqu’à ce que j’aie terminé la mission qu’ils m’ont donnée !… — Puis, prenant à, la hâte son casque, son épée, ainsi que le léger bâton qu’elle avait coutume de porter à la main, la Pucelle descendit en hâte dans la grand’ salle.

— Jeanne, — lui dit l’échevin Jamet du Tilloy, honnête et courageux citoyen, — tout était prêt, selon le conseil d’hier, pour attaquer ce matin la bastille de Saint-Loup ; mais, au point du jour, un messager est venu nous annoncer l’arrivée d’un grand convoi de vivres et de munitions que nous envoient, par le chemin de la Sologne, les gens de Blois, de Tours et d’Angers, sous la conduite du maréchal de Saint-Sever. L’escorte du convoi n’est pas assez nombreuse pour passer sans péril à portée de la bastille de Saint-Loup, qui domine la seule route praticable aux charrois ; les Anglais peuvent sortir de leur redoute, assaillir ce ravitaillement, impatiemment attendu par la ville, bientôt sur le point de manquer de vivres et de munitions d’artillerie. Les capitaines, encore assemblés en conseil à cette heure, débattent la question de savoir s’il vaut mieux attaquer la bastille de Saint-Loup que d’aller au devant du maréchal de Saint-Sever, qui attend un renfort pour continuer sa marche vers Orléans.

— À quelle distance ce convoi est-il d’ici, messire ?

— À deux lieues environ ; il devra forcément passer devant le front de la redoute de Saint-Loup.

Jeanne, après un moment de réflexion, répondit avec assurance :

— Songeons avant tout au ravitaillement de la ville et aux munitions ; l’on ne se bat sans poudre, ni sans vivres. Faisons entrer ce