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des députés des communes, tonne contre cet abus odieux, dès les premières séances de l’Assemblée nationale, et, énergiquement soutenu par l’attitude menaçante du peuple de Paris, il déclare qu’à l’avenir l’adhésion de la noblesse et du clergé n’enchaînera pas les députés dela bourgeoisie, et que si, contre sa décision, les seigneurs et les prélats accordent au roi des levées d’hommes ou de l’argent sans garanties sérieuses du bon emploi de ces troupes et de ces impôts pour la chose publique, les villes, malgré les décrets, ne fourniront ni hommes ni argent. Ce langage énergique et sensé, mais inouï jusqu’alors, impose aux États-généraux ; Marcel, au nom des députés de la bourgeoisie, pose à la royauté les conditions auxquelles il consent à accorder des hommes et des subsides ; la royauté accepte, sachant le peuple de Paris prêt à soutenir Marcel. Malheureusement (et il devait en faire plus d’une fois l’épreuve), il reconnut bientôt la vanité des promesses royales ; l’argent voté par l’Assemblée nationale est follement dépensé par le roi et par ses courtisans ; les levées d’hommes, au lieu d’être employées contre les Anglais, dont les envahissements vont toujours croissant, servent aux guerres privées du roi Jean contre plusieurs seigneurs, afin d’agrandir ou de sauvegarder ses domaines particuliers. L’audace des Anglais redouble ; ils rompent une trêve conclue et menacent le cœur de la Gaule. C’est alors que le roi Jean convoque en hâte sa fidèle et bien aimée noblesse, l’appelant à la défense du pays. Vous avez vu, fils de Joel, de quelle façon ces vaillants coureurs de tournois ont accueilli le héraut royal, lors de la passe d’armes de Nointel ; pourtant, bon gré mal gré, bon nombre de ces preux, commençant à redouter pour eux-mêmes l’invasion étrangère et traînant leurs vassaux à leur suite, rejoint le roi Jean aux environs de Poitiers ; mais à la première attaque des archers anglais, cette brillante chevalerie tourne bride, joue des éperons, fuit lâchement et fait massacrer les pauvres gens qu’elle avait contraints à la suivre ; le roi Jean reste prisonnier des Anglais, et son fils Charles, duc de Normandie, un enfant de vingt