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ne leur donnais mieux et plus que lui ? Marcel m’a encore dit avec son bon sens ordinaire : « — Vous, sire, qui ambitionnez la couronne, vous ne verrez dans chaque réforme qu’un moyen de vous affermir sur le trône ; le régent, au contraire, ne verrait dans chaque réforme qu’une atteinte à la souveraineté de ses droits héréditaires. »

— Charles-le-Mauvais, si telles sont tes intentions, si chacune de tes paroles n’est pas un mensonge ou ne cache pas un piége, pourquoi as-tu massacré les Jacques ? pourquoi as-tu écrasé ce soulèvement populaire ? Ne devait-il pas assurer l’affranchissement de la Gaule et chasser les Anglais de notre sol…

— Me prends-tu pour une buse ? Sur quoi régnerais-je si la Gaule était complétement libre ? Et la seigneurie, que deviendrait-elle ? Non, non, bon gré, mal gré, je serai forcé de consentir bon nombre de réformes qui satisferont les bourgeoisies ; je me résignerai non pas à être l’instrument passif des Assemblées nationales, ainsi que le veut Marcel, mais à gouverner de concert avec elles ; et j’emploierai tous mes efforts à terminer la guerre contre les Anglais. Quant à débâter Jacques Bonhomme, non point ; je me ferais un ennemi de chaque seigneur ! Jacques Bonhomme restera Jacques Bonhomme comme devant ! Son affranchissement ! Es-tu donc insensé ? Qui donc remplirait le trésor royal ? Qui donc taillerait-on à merci et à miséricorde ? L’affranchissement de Jacques Bonhomme ! Eh ! ce serait la fin de la seigneurie et de la royauté !… Ces pestes de franchises bourgeoises, issues des exécrables communes, sont déjà trop menaçantes pour les trônes… Ceci entendu, tu diras à Marcel que, dès demain, je réunirai les différentes troupes de mon armée, et que je marcherai vers Paris, dont il m’ouvrira, je l’espère, les portes… Aussi, afin de convenir avec lui de ce fait et d’autres, tu lui diras de venir me trouver à Saint-Ouen, où je serai après-demain soir…

L’impitoyable logique de Charles-le-Mauvais redoublait encore