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qu’il briserait au besoin !… » Eh bien ! moi, j’ai brisé l’un des redoutables instruments de Marcel, j’ai anéanti la Jacquerie… oui, et en ce moment, mes amis Gaston Phœbus, comte de Foix, et le captal de Buch écrasent à Meaux les derniers tronçons de ce maudit serpent de révolte qui voulait se dresser contre la seigneurie…

— La Jacquerie écrasée ! anéantie ! — dit Mahiet avec une stupeur croissante. Puis, revenant à son premier soupçon : — Charles-le-Mauvais, tu es le plus méchant et le plus fourbe des hommes… tu me tends un piége… Si les Jacques sont venus à Clermont au nombre de huit à dix mille, tu n’avais pas de forces suffisantes pour les exterminer.

— Messire envoyé, tu es trop prompt dans tes jugements. Écoute d’abord, tu apprécieras ensuite. Je t’ai promis des faits ; les voici : Hier, vers le milieu du jour, j’ai été averti de l’approche des Jacques ; la bourgeoisie de Clermont et les corps de métiers, infectés du vieux levain communier, sont sortis de la ville afin d’aller à la rencontre de ces forcenés et de leur faire fête. J’ai encouragé ces démarches ; et pendant que les Jacques faisaient halte dans certain bienheureux vallon situé en dehors de Clermont, trois de leurs chefs se sont présentés au pont-levis demandant à m’entretenir, car ils venaient, disaient-ils, devers moi en amis…

— Les noms ? — s’écrie Mahiet avec anxiété, — les noms de ces chefs ?

— Guillaume Caillet… Adam-le-Diable… et Mazurec-l’Agnelet… ton frère !…

— Mon frère ! — répète l’Avocat d’armes stupéfait. — Comment sais-tu ?…

— Oh ! je sais beaucoup de choses… et je ne te cacherai rien ; ma sincérité est connue… J’ai donc ordonné d’introduire près de moi les trois chefs des Jacques ; je les ai fort courtoisement accueillis, leur touchant dans la main, les appelant mes compères, leur donnant, de par Dieu, l’accolade ! Nous sommes convenus que, d’après les volontés