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CHAPITRE IV.


Le château de Chivry. — La salle du dais. — Le sire de Nointel ramène aux pieds de sa fiancée dix captifs enchaînés. — Un repas de noce au quatorzième siècle. — La poterne du château. — La loi du talion. — Le pont de l’Orville. — Le sire de Nointel et le chevalier de Chaumontel. — Charles-le-Mauvais. — Message de Mahiet. — Politique du roi de Navarre. — Guillaume Caillet couronné roi des Jacques.




Le château de Chivry, situé à trois lieues de Nointel et bâti, comme presque tous les manoirs féodaux, au sommet d’une montagne escarpée, n’a rien à redouter d’une attaque de vive force ; défendu par cent hommes d’armes et par sa position, il peut résister à un long siége ; et pour entreprendre une pareille attaque, des machines de guerre et des engins d’artillerie eussent été indispensables. La magnificence intérieure de cet édifice seigneurial égale sa force défensive ; entre autres somptuosités, la salle du dais, ou salle d’honneur, offre un coup d’œil splendide. Ses solives, peintes et dorées, étincellent sur le bleu du plafond ; de riches tentures couvrent les murailles, et d’énormes cheminées de pierre sculptée, où brûlent des troncs d’arbres entiers, s’élèvent aux deux extrémités de cette immense galerie, éclairée par dix fenêtres à ogives, aux vitraux armoriés, et large de cent pas, sur deux cents de longueur ; vastes dimensions indispensables aux cérémonies des festins d’apparat, dans lesquels les majordomes du sire de Chivry entrent, selon la coutume, à cheval, par l’une des portes de la salle, apportant solennellement dans des plats d’argent les mets d’honneur, tels que paons et faisans rôtis, ornés de leur tête, de leurs ailes et de leurs queues chatoyantes ; ou encore pâtisseries gigantesques représentant le manoir seigneurial, orné d’un écusson armorié de vives couleurs, glorieux mets que les pages placent sur la table devant la reine du festin.