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son fils.) Viens, mon enfant, nous serons noyés tous deux… Va ! cette mort sera douce auprès du supplice du feu qui nous attendait !

En descellant quelques-unes des pierres de la margelle du puits qui doivent servir à écraser Giraude et Aloys lorsqu’ils auront été jetés à l’eau, les aides du bourreau aperçoivent Florette étendue sans mouvement, mais respirant encore. Deux de ces hommes, saisis de pitié, transportent la pauvre enfant à quelques pas de là, pendant que la dame de Lavaur et son fils sont amenés devant l’ouverture rase, béante et noire de la citerne…

Giraude, au bourreau. — Nous allons mourir… Nous ne pouvons, mon fils et moi, faire aucune résistance ; par grâce délivrez-nous de nos liens… nous pourrons au moins une dernière fois nous embrasser ! (S’adressant à son fils d’une voix déchirante.) Dis, mon pauvre enfant, quel mal leur avons-nous donc fait, à ces prêtres !

La dame de Lavaur et Aloys sont délivrés de leurs liens, et tandis qu’enlacés dans les bras l’un de l’autre, ils s’étreignent en sanglotant et échangent un dernier adieu, le roi des ribauds fait un signe à ses hommes, et ceux-ci poussent brusquement dans le puits la mère et le fils… On entend le bruit de deux corps tombant dans l’eau… bientôt après celui des grosses pierres lancées sur Giraude et Aloys… Les cris de leur agonie s’élèvent des profondeurs de la citerne, et au bout d’un instant l’on n’entend plus rien… rien !

Voyant le soleil à son déclin, Montfort, peut-être las de ces tueries, et voulant hâter leur fin, ordonne au prévôt de l’armée d’amener sur l’esplanade les hérétiques condamnés à la pendaison. À leur tête, et se soutenant à peine, car il a reçu plusieurs blessures durant le siége, s’avance Aimery, frère de la dame de Lavaur ; près de lui sont Mylio-le-Trouvère et Peau-d’Oie-le-jongleur ; viennent ensuite les consuls et les hommes les plus notables de la ville ; des soldats, l’épée nue, conduisent les prisonniers au pied des instruments de supplice.