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l’âge, à la vivacité de son caractère… que sais-je enfin ? À ce besoin d’aventures, qui semble parfois se réveiller en nous, fils de Joel.

Morise. — En effet, dans ces légendes de ta famille que nous avons lues si souvent, n’avons-nous pas vu Karadeuk-le-Bagaude, Ronan-le-Vagre, Amaël, qui fut favori de Karl-Martel, entraînés d’abord, comme ton frère, à une vie vagabonde ; mais, j’en suis certaine, Mylio, tôt ou tard, regrettera ses erreurs et nous le reverrons !

Karvel. — Je le crois ; seulement, sais-tu, Morise, ce qui me préoccupe ? hélas ! une seule joie a manqué jusqu’ici à notre union, nous n’avons pas d’enfant ! et j’aurais été content de voir Mylio marié, la race de Joel ne se serait peut-être pas éteinte.

Morise. — De ce mariage, moi, je me charge… Ton frère, de retour ici, n’aura qu’à choisir parmi les plus sages et les plus jolies filles de Lavaur.

À ce moment la porte de la chambre s’ouvre, le métayer de Karvel entre précipitamment et dit : — Maître Karvel, voici dame Giraude, son frère et son fils ! ils apportent une jeune fille évanouie !

Au moment où le Parfait va sortir pour aller à leur rencontre, Aimery, sa sœur Giraude et son fils entrent, transportant Florette évanouie. La dame de Lavaur et son frère tiennent la jeune fille entre leurs bras ; ses pieds sont soutenus par Aloys, adolescent de quatorze ans. On dépose Florette avec précaution sur une sorte de lit de repos tressé de paille, et pendant que Morise court chercher un cordial, Karvel touche le pouls de la douce enfant ; l’on voit à ses habits poudreux, à ses chaussures en lambeaux, qu’elle vient de parcourir une longue route ; son front est baigné de sueur, son visage pâle, sa respiration oppressée. La dame de Lavaur, son frère et son fils, silencieux, inquiets, attendent les premières paroles du médecin. Giraude, du même âge que Morise, et d’une beauté remarquable, est vêtue très-simplement d’une robe d’étoffe verte, un chaperon orange, d’où pend un voile blanc qui entoure à demi son visage,