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Peau-d’oie, — Alors, qu’as-tu besoin de moi ?

Mylio. — Il se pourrait que cette fois Florette n’ait pu échapper à la surveillance de sa tante pour venir à notre rendez-vous.

Peau-d’oie. — Ce serait fâcheux, car le temps presse ; il me semble déjà entendre ce coquin d’abbé rugir après sa friture…

Mylio. — Aussi est-il indispensable que je voie Florette ce soir. J’avais prévu la possibilité d’un empêchement, voici mon projet, dont j’ai prévenu la chère enfant : Le meunier Chaillot se couche ivre chaque soir ; or, si Florette, n’ayant pu sortir de la maison, manquait au rendez-vous, tu irais frapper bruyamment à la porte du moulin ; Chaillot, ivre comme une brute, ne quittera certes pas son lit pour venir voir qui frappe, et…

Peau-d’oie, se grattant l’oreille. — Tu es très-certain que ce Chaillot ne se relèvera point ?

Mylio. — Oui, et lors même qu’il se relèverait, je…

Peau-d’oie. — C’est que, vois-tu, ces meuniers ont malheureusement la détestable habitude d’être toujours escortés d’un chien monstrueux, et de plus…

Mylio. — Maître Peau-d’Oie, je vous ai déjà pardonné des interruptions qui auraient dû réduire de beaucoup vos dix deniers, laissez-moi achever ; s’il ne vous convient point de me prêter votre aide, libre à vous, lorsque je vous aurai confié mon projet. (Peau-d’Oie jure de rester muet.) Donc, si Florette manque au rendez-vous, tu iras frapper rudement à la porte de clôture du moulin ; de deux choses l’une : ou la meunière, voyant l’ivresse de son mari, se lèvera pour aller demander qui frappe, ou elle y enverra Florette ; dans le premier cas la chère enfant, c’est convenu entre elle et moi, profite de l’absence de sa tante et accourt me rejoindre ; dans le second cas Florette, ayant un prétexte pour sortir de la maison, vient encore me retrouver, au lieu d’aller voir qui frappe à la porte… Maintenant, supposons que par miracle Chaillot, ne s’étant pas couché ivre, vienne demander qui va là ? (Peau-d’Oie imite l’aboiement d’un