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Églantine. — Dame prêtre, je peux le nommer hardiment ; il s’appelle : Mylio-le-Trouvère.

Marphise, tressaillant, rougissant, et d’une voix altérée. — Quoi ?… Mylio-le-Trouvère ?

Églantine, les yeux baissés. — Oui, dame prêtre.

Marphise, contenant sa surprise et sa vive émotion. — Allez, chère fille ! je prie Dieu que votre amant vous soit fidèle.

La chanoinesse s’avance à son tour, s’agenouille, et souriant, elle frappe légèrement de sa main blanchette son sein arrondi.

Marphise. — Ces signes de douleur annoncent une grande faute, chère fille ! Votre choix est-il donc blâmable ?

La chanoinesse. — Oh ! point du tout ! Mon seul remords est de n’être peut être point assez belle pour mon doux ami ; car il est le plus accompli des hommes : jeunesse, esprit, beauté, courage, il réunit tout !

Marphise. — Et le nom de ce phénix ?

La chanoinesse, languissamment. — Il s’appelle… Mylio-le-Trouvère.

Marphise, avec dépit et colère. — Encore !

La chanoinesse. — Comment… encore ? Que voulez-vous dire ?

Marphise, se contenant. — Je vous demande, douce amie, si vous l’aimez encore ?

La chanoinesse, avec feu. — Oh ! toujours ! dame prêtre ! je l’aimerai toujours !…

Marphise. Allez, chère fille. Qu’une autre s’approche. (Avec un soupir.) Dieu protége les amours constantes !

Ursine, comtesse de Mont-Ferrier, accourt en sautillant comme une chevrette au mois de mai. Jamais n’avez vu, jamais ne verrez plus mignonne, plus pétulante, plus savoureuse créature ; elle avait été l’une des plus forcenées grimpeuses pour la cueillette des fruits ; son chapel de fleurs de glaïeul est posé tout de travers, et l’une des grosses nattes de ses cheveux, d’un blond ardent, tombe