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— Lisez, — dit Molrain ; et, ses deux coudes posés sur la table, il appuya dans ses mains son front pensif, après avoir dit aux échevins : — Surtout, mes amis, quelle que soit la vivacité de nos sentiments, n’interrompons pas la lecture du message.

Alors l’homme du roi lut à haute voix ce qui suit : — « Louis, par la grâce de Dieu, roi des Français, au maire et aux habitants de Laon salut. — Nous vous mandons et ordonnons strictement de rendre, sans contradiction ni retard, à notre aimé et féal Gaudry, évêque de Laon, les clefs de cette ville, qu’il tient de nous ; nous vous mandons et ordonnons également d’avoir à remettre à notre aimé et féal Gaudry, le sceau, la bannière et le trésor de la commune, que nous déclarons abolis. La tour du beffroi et la maison communale seront démolis avant l’espace d’un mois pour tout délai. Nous vous mandons et ordonnons de plus d’avoir désormais à obéir aux bans et ordres de notre aimé et féal Gaudry, évêque de Laon, ainsi que ses prédécesseurs et lui ont toujours été obéis avant l’établissement de ladite commune ; car nous ne pouvons manquer de garantir à nos aimés et féaux évêques la possession des seigneuries et des droits qu’ils tiennent de Dieu comme ecclésiastiques et de nous comme laïques. Ceci est notre volonté.

» Signé : Louis ».....................

La recommandation de Jean Molrain fut religieusement observée. L’envoyé du roi lut son message au milieu d’un morne silence ; mais, à mesure qu’il avançait dans la lecture de cet acte, dont chaque mot était une menace, une iniquité, un outrage, un parjure envers la commune, le maire et les échevins échangeaient des regards où se peignaient tour à tour la surprise, le courroux, la douleur et la consternation. Oui, grande était la surprise des échevins… car Fergan n’avait pas encore pu leur faire part de son entretien avec l’archidiacre ; et quoiqu’ils s’attendissent au mauvais vouloir du roi, jamais ils n’avaient pu supposer une si flagrante négation de leur droits consen-