— Le palais de Brunehaut est hors de l’humanité ; lorsqu’on met le pied ici, l’on sort du monde connu ; ses lois n’existent plus. Lorsque je me suis approché de cette porte, il m’a semblé entendre deux damnées dans l’enfer des catholiques… Cette rencontre est rare… j’ai écouté.
— Vieillard… j’aime ton courage, tu supporteras vaillamment la torture, elle durera plus longtemps. Tu connais l’ami Pog et ses garçons, que j’ai tout à l’heure fait avertir par un de mes pages ?
— Le bourreau et ses aides, je suppose…
— Justement… Dis-moi… quel âge as-tu ?
— L’âge d’un homme qui va mourir.
— Tu t’attendais à la mort ?
Loysik haussa les épaules sans répondre.
— C’est juste, — reprit Brunehaut avec un sourire affreux, — apporter de pareilles nouvelles, c’était courir au-devant du supplice…
— Je suis venu ici de mon plein gré, votre chambellan et ses hommes sont restés prisonniers dans le monastère ; il ne leur sera fait aucun mal.
— Vieillard, tu te trompes… Oh ! un châtiment terrible les attend. Infamie… lâcheté… honte et trahison ! Un officier, des hommes de guerre de Brunehaut prisonniers d’une poignée de moines ! L’ami Pog et ses garçons auront plus de besogne que je ne le croyais.
— Vos hommes de guerre n’ont pas été lâches ; eussent-ils été deux fois plus nombreux, ils n’auraient pu résister aux gens du monastère et de la vallée de Charolles…
— Vraiment…
— Non, car mes frères ont résolu de vivre ou de mourir libres. Si vous méconnaissez les droits que leur garantit une charte du feu roi Clotaire Ier.
— Et cette charte… tu l’invoques auprès de moi ?…