Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/44

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

naire, mélangée d’enthousiasme, de stupeur et d’espoir ; le trouble de son esprit cessa, il se sentit rassuré, réconforté, comme s’il eût trouvé un appui aussi inattendu que puissant ; il voyait enfin quelque chose de providentiel dans ce rapprochement formidable : — L’image de Victoria dans le palais de Brunehaut. — Oui, cette médaille, c’était celle de la mère des camps ; au-dessous de son effigie on lisait : Victoria empereur.

Loysik s’était courbé, afin de contempler de plus près les traits de l’héroïne gauloise ; lorsqu’il l’eut reconnue il fléchit un genou, et levant ses deux mains vers l’image auguste, il murmura :

— Ô Victoria… sainte guerrière de la Gaule ! ta présence en cet horrible lieu raffermit mon esprit et mon espoir ; il me semble qu’elle me donnera la force de sauver la descendance de Scanvoch, ce fidèle soldat que tu appelais ton frère, et qui fut un de mes aïeux !… Oui, je le sauverai lui et tous nos frères de cette vallée, où ta mémoire auguste est encore glorifiée.

Brunehaut et Warnachaire, stupéfaits de l’étrangeté de ce vieillard, qui n’avait d’ailleurs rien d’offensif, tantôt le suivaient des yeux, tantôt se regardaient en silence durant le peu d’instants qui suffirent à Loysik pour reconnaître l’effigie de Victoria. La reine, de plus en plus convaincue que ce moine était fou, perdit patience, frappa du pied et s’écria :

— Duk, appelle mes pages, qu’ils chassent d’ici à coups de houssine ce vieux fou qui se dit abbé du monastère de Charolles, et qui vient s’agenouiller devant mes médailles antiques, en leur adressant je ne sais quelles invocations insensées ; mais je ferai rudement châtier ceux qui ont laissé ce vagabond s’introduire ici.

Brunehaut parlait encore lorsqu’un de ses pages entra par la porte de la grande salle, et après avoir fléchi le genou lui dit :

— Glorieuse reine… un messager arrive à l’instant de l’armée, il est porteur de lettres urgentes pour le seigneur Warnachaire.

— Cela est important, duk, va recevoir ce messager, reviens