Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/278

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dis que les brusques ondulations de son sein de quinze ans soulevaient l’étroit corsage de sa robe. Le trouble de Vortigern égalait le trouble de Thétralde ; comme elle, il restait muet, embarrassé ; comme elle, il tenait les yeux baissés ; comme elle enfin, il sentait son cœur battre avec violence. Le silencieux embarras des deux enfants fut interrompu par Thétralde. D’une voix timide et mal assurée, elle dit au jeune Breton sans oser le regarder : — Je croyais ne pouvoir jamais te rejoindre ; ton cheval avait tant d’avance sur ma haquenée…

— C’est que… mon cheval m’a emporté…

— Oh ! je m’en suis aperçue… ma sœur Hildrude aussi, — ajouta Thétralde en fronçant ses jolis sourcils ; — alors nous nous sommes élancées toutes deux à ta poursuite… de peur que, dans ton ignorance des routes de la forêt, tu ne t’égares, — se hâta d’ajouter Thétralde.

— Aussi m’avait-il semblé entendre le galop de deux chevaux…

— Ma sœur voulait me dépasser ; mais, moi, j’ai appliqué sur la tête de son cheval un bon coup de houssine. Alors, tout effaré, il s’est jeté de côté dans une allée où il a emporté Hildrude ; ne pouvant le maîtriser, elle a poussé un cri de colère.

— Mais elle court un danger, peut-être ?

— Non, non ; ma sœur finira par arrêter son cheval. Seulement, comme le brouillard est très-épais, elle ne pourra pas nous rejoindre, et j’en suis bien aise.

Vortigern était au supplice ; pourtant un sentiment d’une douceur ineffable se mêlait à ses angoisses. Les deux enfants restèrent de nouveau silencieux ; la fille de l’empereur des Franks rompit encore la première le silence en disant au jeune Breton : — Tu ne parles pas… Est-ce que cela te chagrine que je t’aie rejoint ?

— Non, oh ! non !…

— Tu me trouves peut-être méchante, parce que j’ai battu le che-