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reur en se tournant vers le groupe de chasseresses. — N’êtes-vous pas de mon avis ?

— Tu avais demandé à ce jeune homme sa pensée, — répondit la brune Hildrude en regardant fixement Vortigern ; — il a parlé sincèrement. De ceci, je le loue ; il dit ce qu’il fait, il ferait ce qu’il dit. Vaillance et loyauté se lisent sur son visage.

La blonde Thétralde, n’osant parler après sa sœur, devint vermeille comme une cerise, et jeta un regard d’envie, presque de colère, sur la brune Hildrude, dont elle jalousait sans doute la repartie.

— Il me faut donc louer aussi ce jeune païen de sa franchise pour n’être point en désaccord avec ces fillettes, — dit l’empereur. — Allons, en marche ! — Et, se penchant à l’oreille d’Amael, il lui dit tout bas, en lui montrant d’un regard malin la foule de ses courtisans si brillants, si miroitants sous leurs tuniques emplumées : — Voilà des compères fort richement vêtus, n’est-ce pas ? Regarde-les attentivement ; tâche de ne pas oublier la magnificence de leurs costumes, je te rappellerai ce souvenir en temps opportun. — Et l’empereur partit au galop suivi de toute sa cour, après avoir dit aux courtisans, ainsi qu’aux deux Bretons : — Une fois en forêt, chacun pour soi, et à la grâce de son cheval. À la chasse, il n’y a plus d’empereur et de cour, il n’y a que des chasseurs !




La chasse avait lieu dans une vaste forêt, située aux portes d’Aix-la-Chapelle. Le soleil d’automne, d’abord radieux, s’était peu à peu voilé sous l’un de ces brouillards si fréquents dans cette saison et dans ces pays du Nord. D’après l’ordre de l’empereur, aucun de ses courtisans ne s’était attaché à ses pas ; les chasseurs se disséminèrent : les uns, plus aventureux, ne quittaient pas la meute acharnée à la poursuite du cerf à travers les futaies ; les autres, moins intrépides veneurs, se guidant d’après le son des trompes ou les aboie-