Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/273

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— « Tu es vif, agile et prompt, — lui cria l’empereur ; — tu as bon pied, bon bras, bon œil ; la tranquillité de notre royaume est, chaque jour, troublée par la guerre ; nous avons très-grand besoin de clercs de ton espèce ; reste donc pour partager nos fatigues, puisque tu peux monter si lestement à cheval (GG)… Je donnerai ton évêché à un homme moins ingambe. »


Le jeune évêque baissa la tête avec confusion. Il regardait l’empereur d’un air suppliant, lorsque l’on entendit les aboiements lointains d’une meute nombreuse et le retentissement des trompes. — C’est ma vénerie, — dit l’empereur ; — nous allons partir pour la chasse, seigneur Breton, et ce soir, si tu le veux, nous causerons… Retourne chez toi avec ton petit-fils ; l’on vous servira votre réfection du matin, après quoi vous viendrez me rejoindre ; je suis curieux de voir si ton jouvenceau est aussi habile écuyer qu’on le dit, et puis, vois-tu, quoique l’exercice de la chasse soit un plaisir frivole, plaisir que j’aime, je l’avoue, avec passion, car, en temps de paix, il me maintient en vigueur et en santé, tu trouveras peut-être que Karl le Batailleur tire parfois bon parti des frivolités. Allez donc prendre votre repas, je vais prendre le mien, et ensuite, à cheval !




Octave était venu chercher Amael et son petit-fils après leur réfection du matin. Tandis qu’ils se dirigeaient vers l’une des cours du palais, le jeune Romain, profitant d’un moment où le vieillard ne pouvait l’entendre, dit tout bas en riant à Vortigern : — Heureux garçon ! je suis certain que deux paires de beaux yeux, les uns noir d’ébène, les autres bleu d’azur, ont déjà cherché au loin dans la foule des courtisans… — Mais, s’interrompant à la vue de la vive rougeur dont le visage du jeune Breton se colorait, Octave ajouta : — Attends donc la fin de mes paroles avant de devenir pourpre… Je disais que deux beaux yeux bleus et deux beaux yeux noirs ont, plus d’une fois déjà, cherché dans la foule des courtisans… la vénérable figure