tard, si je retourne auprès de lui ma mission heureusement accomplie ; je retrouverai les chevaux et les présents à l’abbaye où j’irai demain te rejoindre, et de là, je partirai avec mes hommes. Mais, dis-moi, tu as dû faire un long circuit, d’après le chemin que tu as pris ?
— Karl m’avait donné le commandement d’une grosse troupe qu’il envoie se cantonner sur les frontières de cette maudite Bretagne.
— Veut-il donc l’attaquer ?
— Je ne sais ; j’ai laissé ces troupes retranchées dans l’enceinte de deux anciens camps romains, l’un à droite et l’autre à gauche de cette longue route qui y conduit.
— Cette troupe est-elle nombreuse ?
— Environ deux mille hommes, répartis dans les deux camps.
— Karl ne peut rien tenter contre la Bretagne avec si peu de soldats.
— Il veut seulement, je crois, observer les frontières de ce pays, et, sa guerre avec les Frisons terminée, venir en personne attaquer et réduire cette maudite Armorique ; car, dis, Berthoald, n’est-ce pas une honte pour nous autres Franks que cette province ait résisté à nos armes depuis plus de trois siècles que le glorieux Clovis a conquis la Gaule !
— Oui, l’indépendance de l’Armorique est une honte pour les armes des Franks.
— Tiens, voici la lettre de Karl, — dit Bertchramm en tirant enfin de dessous sa cuirasse un petit rouleau de parchemin et le remettant à Amael ; puis voyant amener les chevaux caparaçonnés de riches housses dont les esclaves achevaient de les débarrasser, Bertchramm reprit : — Regarde ! est-il au monde de plus nobles, de plus fiers animaux ?
— Non, — répondit Amael ne pouvant s’empêcher d’admirer les deux superbes étalons qui, difficilement contenus par les esclaves, tantôt se cabraient violemment, tantôt de leur léger sabot, heurtaient