où vous trouver aujourd’hui ? est-ce chez la femme esclave, violentée par les maîtres de son corps ?… Est-ce chez la femme libre ? quand sous ses yeux le foyer domestique devient un lupanar ? Oh ! mes sœurs, mes sœurs ! fermons les yeux, vivons vite et mourons jeunes… c’est le bel âge pour mourir… Veux-tu mourir, mon Vagre ?
— Quand, ma Vagredine ?
— Demain, aux premiers rayons du soleil ; demain, à l’heure où les oiseaux s’éveillent, dis, veux-tu mourir ? ta main dans la mienne, nous partirons ensemble pour ces mondes inconnus, où nos aïeux, plutôt que de se quitter, s’en allaient vaillamment ensemble pour revivre ensemble !
— Es-tu déjà si lasse d’amour, ma belle évêchesse ?
— Mon Vagre, craindrais-tu la mort ?
— Je ne crains qu’une chose : la vie sans toi…
— À demain donc… la mort ensemble !
— Et vive l’amour jusqu’à demain ! En attendant, un beau baiser, ma Vagredine ?
Le Veneur prend le baiser, pendant que son voisin, grave comme un homme entre deux vins, dit d’une voix magistrale :
— Frères, j’ai une idée…
— Ton idée, Symphorien, semble être de vider complètement cette amphore…
— Oui, d’abord… puis de vous démontrer logicè… à priori…
— Au diable le langage romain !
— Frères, pour être Vagre l’on n’en est pas moins souvent fort versé dans les belles lettres et la philosophie… J’enseignais la rhétorique aux jeunes clercs de l’évêque de Limoges ; je fus mandé, pour le même office, par l’évêque de Tulle. En traversant les mont Jargeaux pour me rendre d’une ville à l’autre, j’ai été pris dans ces montagnes par une bande de mauvais Vagres, car il y a de bons et de mauvais Vagres.
— Comme il y a de laides femelles et de jolies femmes.