— À nous le vestiaire, les belles étoffes, les chauds vêtements, et largesse, largesse au pauvre monde qui a froid…
— Et puis à feu et à sac la villa épiscopale !
— Liberté aux esclaves !
— Nous emmenons de pauvres filles qui nous suivront gaiement ! — Et vive le mariage en Vagrerie, — dit Ronan, puis il chanta ainsi :
« Mon père était Bagaude, moi, je suis Vagre et né sous la verte feuillée, comme un oiseau de mai…
» Où est ma mère ?
» Je n’en sais rien…
» Un Vagre n’a pas de femme : le poignard d’une main, la torche de l’autre, il va de burg en villa épiscopale enlever femmes ou concubines à leur comte ou à leur évêque, et emmène ces charmantes au fond des bois…
» Elles pleurent d’abord et rient ensuite… Le joyeux Vagre est amoureux, et dans ses bras robustes ces belles chéries oublient bientôt le cacochyme évêque ou le duc hébêté !… »
— Vive le mariage en Vagrerie !
— Tu es en belle humeur, Ronan…
— Nous allons mettre à sac la maison d’un évêque, vieux Simon !
— Tu seras pendu, brûlé, écartelé…
— Ni plus ni moins qu’Aman et Aëlian, nos prophètes, Bagaudes en leur temps comme nous Vagres en le nôtre… Mais le pauvre monde dit : Bon Aëlian ! bon Aman !… puisse-t-il dire un jour : Bon Ronan !… je mourrai content, vieux Simon…
— Toujours vivre au fond des bois…
— La verdure est si gaie !
— Au fond des cavernes…
— Il y fait chaud l’hiver, frais l’été.
— Toujours l’oreille au guet, toujours par monts et par vallées… toujours errer sans feu ni lieu…