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grand nombre des habitants gaulois de ce pays avaient été massacrés ou emmenés en esclavage lors de la première conquête de 355. La race de ceux qui en petit nombre survécurent, asservie par les Burgondes, ne fut pas aussi misérable que celles de la majorité des provinces conquises ; les rois Gondiok, Gondebaud et son fils Sigismond, régnèrent tour à tour sur ce pays jusqu’en 534 ; à cette époque, Childebert et Clotaire, fils de Clovis, attaquant ces rois burgondes, comme eux de race germaine, ravagèrent de nouveau ce pays, asservirent également et la race burgonde et la race gauloise, et ajoutèrent ce territoire aux autres possessions de la royauté franque.

— Que de ruines ! que de massacres ! que d’esclavage !… Heureux sont nos pères des siècles passés… ils vivent ailleurs qu’en ce triste monde !…

— C’est un terrible temps ! mais, foi de Vagre, nous l’avons rendu terrible aussi pour bon nombre de nos conquérants… Je vous l’ai dit, selon notre promesse faite à Loysik, nous nous étions rapprochés des confins de la Bourgogne… Nous arrivâmes près de Marcigny au commencement de l’automne ; dans ces climats fortunés cette saison est aussi douce que l’été. Le soleil baissait, nous avions marché toute la journée, traversant des contrées jadis fécondes autant que peuplées, et alors incultes, presque désertes. Quelques esclaves se joignirent à nous, d’autres se réfugièrent dans la cité de Marcigny et y jetèrent l’alarme. Nous attendions toujours le retour de Loysik ; pour plus de prudence, nous avions campé sur une colline boisée, d’où l’on dominait au loin la ville, à peine défendue par des murailles en ruines… Vers la fin du jour, nous vîmes arriver mon frère ; il accourait, instruit de notre venue par les esclaves fugitifs. Il me semble encore le voir, gravissant la colline d’un pas précipité, ses traits rayonnaient de bonheur ; après avoir répondu aux témoignages d’affection dont nous l’entourions à l’envi, Loysik fit signe qu’il voulait parler ; il gravit un monticule ombragé d’une châtaigneraie séculaire : la foule s’assembla autour de lui ; à ses pieds s’assirent un