— Et cet homme, dis, Veneur, quel est-il ?
— Réjouis-toi, Ronan, c’est le comte !…
— Neroweg !
— Lui-même… dextrement enlevé tout à l’heure au milieu de ses leudes, par ton père et deux de nos camarades !
— Neroweg ! en notre pouvoir… à nous, Karadeuk, Ronan et Loysik, descendants de Scanvoch ! Ciel et terre ! est-ce possible ?… Le comte Neroweg enlevé… je n’y puis croire !…
— Eh ! vieux Karadeuk ! viens donc de ce côté… Ronan ne peut croire encore à l’enlèvement du sanglier frank…
— Oui, mon fils ; cet homme dont la tête est enveloppée d’une casaque, c’est Neroweg… c’est ma part du butin…
— C’est la tienne, Karadeuk… mais seulement nous te demandons, nous, anciens esclaves du comte, nous te demandons ses os et sa peau…
— Quel dommage de n’avoir pas aussi l’évêque… la fête serait complète…
— L’évêque Cautin est mort !…
— Belle évêchesse, tu serais veuve, si je n’étais ton mari.
— Cautin m’a fait beaucoup souffrir ; mais, aussi vrai que je t’aime, mon Vagre, mon seul désir, à cette heure, est que sa mort n’ait pas été cruelle…
— Le Lion de Poitiers l’a tué.
— Mon père… cet évêque damné, vous l’avez vu mourir ?
— Oui… frappé d’un coup d’épée, par le Lion de Poitiers… L’évêque fuyait l’un des bâtiments incendiés ; le Lion de Poitiers le rencontrant face à face, lui a dit : « Tu m’as forcé de m’agenouiller devant toi, orgueilleux prélat… Je t’ai promis de me venger… je me venge… Meurs… »
— Sa fin est trop douce pour sa vie… Au diable l’évêque Cautin ! il n’enterrera plus de vivants avec les morts… Et le comte, comment vous en êtes-vous emparé, mon père ?