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— Loysik, vous me disiez cette nuit dans la prison : « Fulvie, libre aujourd’hui, retrouvant le Veneur libre aussi, et vous offrant d’être sa femme que répondriez-vous ? » Libre à cette heure, je te dis à toi, mon époux, — ajouta l’évêchesse en se retournant vers le Vagre : — Je serai femme dévouée, mère vaillante, tu peux me croire…

— Et toi, petite Odille, toi, qui n’as plus ni père ni mère, veux-tu de moi pour mari, pauvre enfant, si tu survis à ta blessure ?

— Ronan, je serais morte, que l’espoir d’être votre femme à vous, si bon au pauvre monde, me ferait, il me semble, sortir du tombeau !…




Les Vagres et les esclaves révoltés se dirigent en hâte vers la forêt, Loysik et Ronan toujours portés sur les épaules de leurs compagnons. La petite Odille se prétend guérie de sa blessure depuis que Ronan, son ami, lui a promis de la prendre pour femme ; elle se sent, dit-elle, de force à marcher ; mais l’évêchesse n’y consent pas, et son Vagre, n’abandonnant pas son léger fardeau, continue de marcher près de Fulvie… Au bout de quelques pas, il entend deux Vagres et deux esclaves qui le suivaient à quelques pas, dire en soufflant et maugréant :

— Comme il est lourd, comme il est lourd…

— Si ce sanglier est trop pesant, relayez-vous pour le porter… Ah ! ce n’est pas un léger et joli fardeau comme toi, Odille… passe ton petit bras autour de mon cou, tu seras ainsi plus à ton aise.

— De quel sanglier parles-tu donc, Veneur ?

— Je parle, Ronan, de la part du butin de ton père, le vieux Karadeuk…

— Quel butin ?… Mais, par le diable ! c’est un homme que nos compagnons portent là…

— Oui… c’est un homme bâillonné, garrotté… Nos camarades en ont leur charge ; il se fait lourd…