druidesse, compagne de Civilis, le don sacré de prévoir l’avenir.
Ce que je vais raconter s’est passé il y a huit jours. Ainsi donc, afin de préciser la date de ce récit pour notre descendance, il est écrit dans la ville de Mayence, défendue par notre camp fortifié des bords du Rhin, le cinquième jour du mois de juin, ainsi que disent les Romains, la septième année du principat de Posthumus et de Victorin en Gaule, deux cent soixante-sept ans après la mort de Jésus de Nazareth, crucifié à Jérusalem sous les yeux de notre aïeule Geneviève.
Le camp gaulois, composé de tentes et de baraques légères, mais solides, avait été massé autour de Mayence, qui le dominait. Victoria logeait dans la ville ; j’occupais une petite maison à peu de distance de la sienne.
Le matin du jour dont je parle, je me suis éveillé à l’aube, laissant ma bien-aimée femme Ellèn encore endormie ; je la contemplai un instant : ses longs cheveux dénoués couvraient à demi son sein ; sa tête, d’une beauté si douce, reposait sur l’un de ses bras replié, tandis qu’elle étendait l’autre sur ton berceau, mon enfant, comme pour te protéger, même pendant son sommeil… J’ai, d’un baiser, effleuré votre front à tous deux, de crainte de vous réveiller ; il m’en a coûté de ne pas vous embrasser tendrement, à plusieurs reprises ; je partais pour une expédition aventureuse, il se pouvait que le baiser que j’osais à peine vous donner, chers endormis, fût le dernier. Quittant la chambre où vous reposiez, je suis allé m’armer, endosser ma cuirasse par-dessus ma saie, prendre mon casque et mon épée ; puis je suis sorti de notre maison. Au seuil de notre porte j’ai rencontré Sampso, la sœur de ma femme, et, comme elle, aussi douce que belle ; son tablier était rempli de fleurs humides de rosée, elle venait de les cueillir dans notre petit jardin. À ma vue, elle sourit et rougit de surprise.
– Déjà levée, Sampso ? — lui dis-je. — Je croyais, moi, être sur pied le premier… Mais pourquoi ces fleurs ?
– N’y a-t-il pas aujourd’hui une année que je suis venue habiter